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Chemsex et analyse de drogues : comprendre les pratiques et les produits

Le chemsex se caractérise par des usages intenses, une prédominance des cathinones de synthèse et des risques spécifiques liés tant au contexte sexuel qu’aux mutations du marché des drogues. Lorsqu’ils font analyser leurs produits, les usagers découvrent souvent des résultats éloignés de leurs attentes : substitutions de produits, incertitude sur les dosages et effets imprévisibles. Ces constats renforcent l’importance de l’analyse dans une logique de réduction des risques et d’autonomie des personnes concernées.

Le chemsex : une population et des substances spécifiques

Les données issues du réseau Analyse ton Prod’ apportent un éclairage inédit sur les consommations en contexte de chemsex. Sur 6 175 questionnaires étudiés, 195 personnes (soit 3,2 % de l’échantillon) déclarent avoir consommé dans ce cadre. Parmi eux, une écrasante majorité sont des hommes : 93,3 % des répondants s’identifient comme tels.

Les rythmes d’usage montrent une intensité marquée. Un tiers des personnes consomment une à plusieurs fois par mois, souvent dans un cadre festif récurrent. Mais pour 16 %, la pratique est hebdomadaire et, pour 10 %, quotidienne : des niveaux qui traduisent parfois des usages problématiques, voire des situations d’addiction.

Côté produits, la tendance est claire : les cathinones de synthèse dominent largement. Plus d’un usager sur deux rapporte avoir acheté de la 3-MMC et 14 % mentionnent la 2-MMC. Recherchées pour leurs effets stimulants et désinhibants, elles répondent aux attentes de rapports sexuels prolongés. Cocaïne et kétamine apparaissent plus marginalement. Ces données confirment que le chemsex s’ancre dans des substances bien identifiées, ce qui invite à adapter prévention et accompagnement.

Un marché en mutation : substitutions de produits, risques accrus

Un enseignement majeur ressort de l’analyse : l’écart entre le produit acheté et la substance réellement consommée. Quatre usagers sur dix en contexte de chemsex se retrouvent confrontés à une discordance avérée. Dans 64 % des cas, la 3-MMC annoncée s’avère être en réalité de la 2-MMC.

Cette substitution silencieuse est directement liée à l’interdiction de la 3-MMC aux Pays-Bas et à la réorganisation du marché parallèle. Les revendeurs proposent une molécule proche, mais sans transparence ni information. Pour les consommateurs, l’incertitude est importante : variations de dosage, effets inattendus, risques accrus lors de mélanges ou de redosages.

Dans un contexte de chemsex, où les consommations sont souvent intenses, répétées et combinées, cette imprévisibilité constitue un facteur de vulnérabilité majeur. En effet, pour anticiper, ajuster et se protéger, des informations fiables sont nécessaires.

L’analyse : un outil d’autonomie et de réduction des risques

Face à ces constats, l’analyse des produits s’impose comme un levier essentiel de santé publique. Au-delà de la vérification chimique, elle devient un support de dialogue et un outil d’autonomisation. Recevoir une information claire sur la composition réelle d’un produit permet d’adopter des pratiques plus éclairées et de limiter les risques liés à l’incertitude du marché.

Ces temps d’analyse sont aussi l’occasion d’un échange sans jugement, où les professionnels peuvent construire une relation de confiance et proposer des conseils adaptés.

Les résultats du dispositif Analyse ton Prod’ le démontrent : dans le chemsex, l’analyse rend visibles des risques souvent invisibles, réintroduit de la transparence là où la clandestinité du marché l’efface et accompagne les usagers dans leurs choix. Un outil précieux, qu’il est urgent de pérenniser, renforcer et mieux intégrer dans les pratiques d’accompagnement.

Pour aller plus loin, le guide « Aller vers les chemsexeurs », publié par AIDES et la Fédération Addiction, propose des pistes concrètes de réduction des risques en contexte chemsex.

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